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Pour tous, le nom de Chanel évoque la haute couture et la parfumerie, et d’abord Coco Chanel, qui renversa tous les codes au début du XXe siècle : débarrasser les chapeaux de leurs plumes et autres froufrous, raccourcir les jupes et supprimer la taille pour libérer le corps, créer des vêtements simples et pratiques, porter des cheveux courts… Fondée en 1910 avec l’ouverture d’un magasin de chapeaux à Paris, Chanel Modes deviendra l’empire que l’on sait, et le symbole de l’élégance à la française. De l’introduction du jersey dans la confection de vêtements à la création du parfum N°5 dès 1921, Gabrielle Chanel popularise un nouveau style, le sien, dans l’entre-deux guerres et, notamment, le cardigan et le pantalon pour les femmes. Mais les bijoux proposés à cette époque par Chanel n’ont rien de ceux que les plus célèbres joailliers créent déjà sur la place Vendôme : dans l’esprit de simplicité régnant sur la Maison, les tenues sont assorties de bijoux fantaisie. De fait, alors que ses créations sont souvent qualifiées de « genre pauvre » en raison de leur sobriété – on pense en particulier à la célèbre petite robe noire -, Chanel entend faire la distinction entre dépouillement et sobriété. La tenue doit être simple, mais accessoirisée.
Coco devient en réalité la reine des bijoux fantaisie. Strass, fausses perles, pierres semi-précieuses ornent rapidement les tenues de « Mademoiselle Chanel », elle-même adepte des pierres de couleurs et surtout des perles d’Orient qu’elle porte régulièrement en collier. Créatrice dans l’âme, elle n’hésite pas à démonter au pic à glace les prestigieuses parures reçues de ses intimes, le duc de Westminster ou le grand-duc Vladimir de Russie, pour créer ses propres bijoux. Des broches d’inspiration byzantine, à motif de fleurs, d’animaux – le camélia et le lion sont des fétiches pour Coco Chanel – ou bien encore de coquillages, rendent les bijoux Chanel immédiatement reconnaissables. Un atelier de bijouterie est ouvert au sein de la Maison dès 1924, les bracelets multicolores s’ornent de la Croix de Malte. Ils sont nés de l’imagination du joaillier italien Fulco Di Verdura qui, en réalité, offre à Chanel le style de bijoux que l’on retrouve encore aujourd’hui, avec notamment les chaînes comme des adaptations de croquis de Léonard De Vinci.
« Si j’ai choisi le diamant, c’est parce qu’il représente avec la densité la valeur la plus grande sous le plus petit volume ». En 1932, les diamantaires français peinent à se remettre du krach de 1929. Ils choisissent de faire appel à Gabrielle Chanel pour les aider à se relever, n’en déplaise aux joailliers historiques de la place Vendôme. Coco dessine son unique exposition de haute joaillerie, Bijoux de diamants. Fidèle à elle-même, elle privilégie la création à l’ostentation, la légèreté à la surcharge. Chanel supprime les fermoirs, imagine des colliers ouverts le long du cou, s’inspire des étoiles, des plumes, des franges et des rubans. « Je veux, dit-elle, que le bijou soit au doigt de la femme comme un ruban ». La couturière mue en joaillière reprend aussi d’autres motifs, plus géométriques, ceux qu’elles voyaient chaque jour à l’orphelinat de l’abbaye cistercienne d’Aubazine où elle passa la plus grande partie de son enfance. Une abbaye dont les entrelacs des vitraux ont d’ailleurs directement inspiré les C entrelacés du logo Chanel. Le bijou est vu comme un symbole de la liberté de la femme, cette femme qui peut choisir elle-même ses diamants. La liberté, Gabrielle Chanel la choisit encore lorsqu’elle décide d’exposer sa collection de haute joaillerie, non sa boutique parisienne, mais à son domicile du Faubourg Saint-Honoré.
Il faut pourtant attendre 1993, plus de 60 ans donc, pour que la maison ouvre le département Chanel Joaillerie. On est alors dans la « période Karl Lagerfeld » de l’entreprise. Alain Wertheimer a repris les rênes de Chanel SA depuis 1976 – il en est toujours le directeur. Il est le fils aîné de Pierre Wertheimer, à qui Coco Chanel, piètre gestionnaire, a vendu sa maison dans les années 1950 tout en conservant la direction. Avec Karl Lagerfeld en directeur artistique du département mode, Chanel a retrouvé son lustre. Inès de la Fressange est le visage de la marque. Chanel Joaillerie se lance en rééditant le collier Comète imaginé pour la collection de 1932. En 1997, c’est l’ouverture de la première boutique d’horlogerie-joaillerie de Chanel, sans surprise aucune sur la place Vendôme, et plus précisément dans l’hôtel particulier du numéro 18. L’ouverture en 2009 du studio de création de joaillerie, sous la houlette de Patrice Leguéreau, participe à faire de Chanel l’une des grandes Maisons françaises de haute joaillerie et de joaillerie. Dès l’année suivante, la collection de haute joaillerie Plumes de Chanel permet à l’entreprise de marquer le secteur de son empreinte. L’esprit de Coco Chanel plane toujours sur les créations joaillères de la maison. Il est rappelé en 2012 par la présentation de 80 pièces inédites de la collection Bijoux de Diamant à l’occasion de son 80e anniversaire. Le Lion, la collection de haute joaillerie de 2013, est un hommage direct à Gabrielle Chanel, son signe astrologique et son emblème. « Comme pour garder les secrets de Mademoiselle et veiller sur elle pour l’éternité », le lion reste d’ailleurs l’un des sujets de prédilection de la joaillerie selon Chanel.